La femme peut-elle demander le divorce si son mari ne dépense pas pour elle ?
Question
Si j'ai bien compris une vidéo d’un Cheikh (bien que je ne maîtrise pas parfaitement l’arabe), il semble que si un homme ne parvient pas à subvenir aux besoins de sa femme, et qu’elle se plaint à un juge, cela pourrait entraîner un divorce. Ma question est la suivante : faut-il comprendre que l'incapacité de l'homme à nourrir sa femme, ou le fait de négliger ses devoirs envers elle, entraîne systématiquement un divorce ? Ou bien, est-ce que le divorce ne devient effectif que si la femme demande explicitement le divorce auprès d'un juge ? Et en France, pour qu'un divorce soit effectif, est-il nécessaire que l’épouse fasse la démarche formelle, ou suffit-il qu’elle exprime son désir de divorcer, même sous l'effet de la colère ?
Réponse
Il est de l'obligation du mari envers sa femme de subvenir à ses besoins de manière raisonnable, conformément à la parole d'Allah : « Que celui qui a des moyens dépense selon ses moyens » (Coran, al-Talaq : 7).
La femme n'est pas tenue de subvenir à ses propres besoins, même si elle est riche. Toutefois, si la femme choisit de se montrer généreuse et aide son mari financièrement, cela est sans aucun doute considéré comme une noble qualité et une bonne conduite dans le mariage.
Si le mari ne subvient pas aux besoins de sa femme, elle a le droit de porter son affaire devant le tribunal pour qu'il lui soit accordé son droit, et elle peut demander le divorce pour cette raison. Cependant, si elle accepte et fait preuve de patience envers lui, cela est préférable. Ibn Qudama a dit dans son ouvrage Al-Mughni : « En résumé, si un homme refuse de subvenir aux besoins de sa femme en raison de sa pauvreté ou de l'absence de moyens, la femme a le choix entre être patiente avec lui ou demander le divorce. ».
Nous conseillons à la femme ainsi éprouvée de faire preuve de patience envers son mari dans le but de maintenir l'unité de la famille. Elle doit aussi savoir que l'amour et la tendresse ne sont pas une condition essentielle pour la stabilité de la vie conjugale, comme l'a dit ‘Umar (qu'Allah l'agrée) à un homme qui souhaitait divorcer de sa femme parce qu'il ne l'aimait pas : « Malheur à toi, les maisons sont-elles seulement construites sur la base de l’amour ? Où est la considération, où est l’honneur ? ».
Quant à la réponse du mari lorsqu'il demande des relations conjugales, les juristes ont indiqué que si l'épouse accepte de rester avec son mari qui ne pourvoit pas à ses besoins, elle a le droit de lui refuser le droit à l’intimité. Ibn Qudama (l’hanbalite) a écrit dans Al-Mughni : « Si elle accepte de vivre avec lui dans cette situation (le non-paiement de la pension alimentaire), il n'est pas de son devoir de lui permettre l’intimité. ».
Le shirâzî (le chaféite) a mentionné dans Al-Muhadhab : « Si l'épouse choisit de rester avec son mari malgré sa pauvreté, elle n'est pas obligée de lui permettre l’intimité. ». Cependant, il est préférable et plus prudent que l'épouse ne refuse pas de répondre à son mari sans excuse valable, car il existe des preuves générales qui imposent à la femme l'obligation d'obéir à son mari en matière d'intimité, et qui réprouvent le refus sans raison.
En ce qui concerne l'acte de la femme lorsqu'elle subvient aux besoins de son mari, il s'agit d'un acte de grande vertu, si elle le fait dans l'intention de plaire à Allah. En effet, deux femmes ont demandé au Prophète (paix et bénédictions sur lui) concernant la récompense de la charité donnée au mari et aux orphelins, et il leur répondit : « Elles auront deux récompenses : la récompense de la parenté et celle de la charité. » (Rapporté par Al-Bukhârî et Muslim).
Et Allah sait mieux.