Assurance sociale

Dar al-Iftaa d'Égypte

Assurance sociale

Question

nbsp;                  Nous avons passé en revue la demande enregistrée sous le numéro 226 pour l’année 2012 contenant ce qui suit : quel est l’avis religieux relatif à l’assurance sociale ?

Réponse

 

Tout comme les transactions bancaires, l’assurance, sous toutes ses formes, fait partie des transactions modernes sur lesquelles aucun texte religieux ne se prononce ni par l’autorisation ni par l’interdiction. C’est pourquoi, ce genre de transactions est soumis aux efforts individuels d’interprétation qui visent à dégager des textes généraux les jugements religieux. Par ces textes, on cite à titre d’exemple le dire d’Allah : « Soyez plutôt solidaires dans la charité et la piété et non dans le péché et l’agression ! Craignez Dieu, car Dieu est Redoutable quand Il sévit[1]. », ainsi que le dire du Prophète : « Dans leur affection, leur miséricorde et leur solidarité, les croyants sont comparables au corps : si un de ses organes se plaint d’un mal, le corps tout entier réagit par l’insomnie et la fièvre. » (Rapporté par al-Boukhari), etc.
 
Les trois types d’assurance :
L’assurance mutuelle : établie par un groupe d’individus ou d’associations dans le but de dédommager les préjudices qui pourraient frapper certains de leurs membres.
L’assurance sociale : établie par l’Etat et basée sur la solidarité sociale, cette forme d’assurance est destinée à ceux qui, pour gagner leur vie, s’exposent au danger.
L’assurance commerciale : fondée par les sociétés anonymes et créée pour cette fin.
Pour le premier et le second type d’assurance, ils sont presque unanimement conformes aux principes de la charia vu qu’il s’agit, à l’origine, d’une donation, d’une solidarité en matière de charité et de piété, d’une réalisation du principe de la solidarité sociale et de l’entraide entre Musulmans sans but lucratif. En outre, ces deux genres d’assurance ne renferment ni aléa ni ignorance. Et l’indemnité reçue à titre de dédommagement - même supérieure à la cotisation payée - ne saurait être considérée comme usure ; car cette indemnité versée n’est pas en échange d’un délai mais plutôt d’une donation accordée à titre de dédommagement.
Quant au troisième type relatif à l'assurance commerciale, y compris l'assurance sur les personnes, les avis ont fortement divergés de la manière suivante :
Certains jurisconsultes précisent que cette forme de transaction est illicite car elle est aléatoire et fait partie du jeu de hasard et de l'usure qu'interdit la Chari'a.
D'autres savants précisent que l'assurance commerciale est permise et n'est pas en contradiction avec les principes de la Chari'a car elle est principalement fondée sur la coopération dans l'accomplissement des bonnes œuvres et la solidarité sociale. A l'origine, cette forme, loin d'être compensatoire, n'est autre chose qu'une donation. Ces savants se sont appuyés sur la généralité des textes du Coran et de la Sunna et aussi sur le raisonnement analogique.  
Dans le Coran, Allah dit : "O les croyants, remplissez fidèlement vos engagements". A propos de ce verset, les savants précisent que : "le terme "engagement" est général et comprend toute forme d'engagement y compris l'assurance etc.… si cet engagement avait été interdit, le Prophète l'aurait indiqué. Vu que le Prophète n'a pas indiqué la restriction de ce terme, il s'applique donc à toutes formes d'engagement, y compris l'assurance.
Quant à la Sunna, Omar Ibn Yathribi rapporte ce qui suit : j'ai assisté au discours du Prophète à Ména. Parmi ses propos, j'ai entendu dire : " Il n'est pas permis à une personne de profiter du bien de son frère sauf de ce que ce dernier donne de son gré. ". Donc, le Prophète établit comme critère de licéité le fait de donner de son gré. Dans les contrats d'assurance, les deux parties se mettent d'accord sur le fait de profiter du bien selon un moyen convenu et par conséquent, cette forme est permise.
Par raisonnement analogique, l’assurance ne comporte pas d’inconvénient religieux ; car il s’agit d’une donation échelonnée accordée par l’assuré et aussi d’une donation octroyée de la part de la société à titre de dédommagement et d’entraide dans l’épreuve.
De même, les savants se sont appuyés sur l'usage. En effet, il est courant et coutumier de conclure ces formes de contrat. L'usage, bien entendu, constitue l'une des références de la législation en Islam. Il en va de même pour l'intérêt général.
Nombreux sont les point communs entre l'assurance commerciale d'une part et l'assurance compensatoire et sociale d'autre part. Ces deux dernière formes sont unanimement en conformité aux principes de la Chari'a. Cette analogie rend licite la première forme de l'assurance.
Le contrat d'assurance sur la vie qui représente l'une des catégories de l'assurance commerciale ne fait pas partie des contrats aléatoires interdits car il s'agit d'un contrat de donation et non pas d'un contrat de compensation dont l'élément aléatoire risque de lui entraîner la nullité.
En effet, l'élément aléatoire dans cette forme d'assurance ne suscite pas de conflit entre les parties car on en fait couramment usage dans tous les domaines des activités économiques. En vérité, tout ce qui les gens ont l'habitude de faire sans soulever de conflit est permis d'en faire usage.
L'élément aléatoire s'illustre dans le contrat conclu entre les individus et la société. Or, l'assurance intervient dans tous les domaines économiques et les entreprises s'occupent maintenant des contrats d'assurance collective pour tous ceux qui y travaillent et que l'individu connaît d'avance le montant de ce qu'il doit payer et de ce qu'il recevra à la fin, il est inconcevable d'y trouver l'élément aléatoire interdit.
De même, il n'existe pas dans le contrat de l'assurance commerciale aucun aspect aléatoire puisque le jeu de hasard est basé sur la chance, alors que l'assurance est basée sur des principes précis et sur des calculs étudiés.
L'étude des polices de différentes formes d'assurance émises par les Sociétés d'Assurance démontre que la plupart de ses clauses ne sont que des règlements établis par les sociétés d'assurance. Une fois acceptées par l'assuré, ils doivent être respectés.
La plupart de ces clauses, dans leur ensemble, ne sont pas en contradiction avec les principes de la Chari'a. Toutefois, il existe certains clauses qui doivent être supprimés ou modifiés pour s'accorder avec les principes de la Chari'a et aussi pour être en conformité aux décisions prises par les responsables des sociétés d'assurance lors la séance tenue sous le patronage du grand Mufti de la République Arabe d'Egypte, au siège égyptien de Fatwas le 25/3/1997.
La modification concerne les clauses suivantes :
1- clause portant sur ce qui suit :
 "Restituer le montant intégral des primes tant que l’assuré est encore en vie à la fin de la période de l'assurance".
Cette clause doit être modifiée comme suit :
- "Restituer le montant intégral des primes avec leurs intérêts après le prélèvement d'une portion définie en contrepartie des travaux administratifs qu'accomplit la société si l’assuré est encore en vie à la fin de la période de l'assurance".
2- clause 10 portant sur ce qui suit :
"Si l’assuré, averti par une lettre confirmée, n'a pas payé les primes dans le délai défini et que les primes des trois premières années n'ont pas été payées, le contrat doit être annulé sans avertissement et les primes payées reviennent de droit à la société".
Cette clause doit être modifiée comme suit :
"Les primes payées doivent être restituées à l’assuré après le prélèvement d'une portion qui ne dépasse pas 10% en contrepartie des travaux accomplis par la société pour faire éviter à la société de dévorer illicitement les biens des gens".
3- clause 13 portant sur ce qui suit :
Premier paragraphe
"La réclamation des droits résultant du contrat de l'assurance restera sans effet si l’assuré ne les réclame pas ou si l'héritier ne fournit pas les documents prouvant le décès de cet assuré".
Ce paragraphe doit être annulé car une fois le droit est prouvé en faveur de l’assuré, il ne pourra en aucun cas être annulé même si les ayants-droit ne le réclament pas. Les biens doivent être transférés au trésor public des musulmans dix ans plus tard.
Deuxième paragraphe
« Après trois ans du décès de l’assuré et pour cause d’ancienneté, les bénéficiaires perdent leur droit d’intenter un procès contre la société d'assurance pour récupérer les droits inclus dans ce contrat. »
Ce paragraphe doit être modifié comme suit :
"Le droit de la réclamation ne peut être annulé qu'après 33 ans : il s'agit d’un délai de l'ancienneté pour intenter un procès dans le domaine des droits civils selon les jurisconsultes musulmans".
Dans le cas échéant, les différentes formes de l'assurance sont devenues une nécessité sociale qu'on ne peut pas éviter car le nombre des ouvriers dans les usines et les sociétés économiques, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, s’est multiplié. Les sociétés protègent bien le capital pour qu'il puisse servir de support à l'économie qui représente le fondement de la vie.
De même, les sociétés protègent les ouvriers en appliquant l'assurance sur leur vie présente et future. L'assurance ne vise pas donc l'intérêt ou le profit illégitime.
En vérité, l'assurance vise à établir la solidarité et la coopération pour épargner aux individus les dégâts des accidents et des catastrophes. L'assurance n'est pas une taxe perçue par force. Il s'agit d'une entraide et d'une coopération pour l'accomplissement des bonnes œuvres recommandées par l'Islam.
Les pays du monde appliquent le système de l'assurance en vue de réaliser le bien-être de leurs communautés et de leurs peuples. L'Islam n'a pas barré la route devant les Musulmans car il est la religion du progrès, de la civilisation et de l'ordre. Parmi les Ulémas, anciens et tardifs, se trouvent ceux qui ont autorisé l'assurance sociale en s'appuyant sur des arguments qu'on a déjà cités.
Selon le siège égyptien de Fatwas, il n'y a aucun inconvénient pour appliquer les différentes formes du système de l'assurance. Nous espérons élargir la sphère de l'assurance pour couvrir tous les individus.
De même, nous espérons que le montant payé par mois ou par an soit abordable et obligatoire afin qu'on puisse avoir l'habitude d'économiser et de donner bénévolement. Les sommes payées et leur investissement reviendront aux assurés et à leurs pays.
Les nations développées et les grandes communautés nourrissent chez leurs enfants l'amour de l'économie et de ce qui leur est utile dans les deux vies ; l'ici-bas et l'au-delà.
 


[1] Coran, al-Ma’ida, 2.
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