Nuit de mi- Cha’ban

Dar al-Iftaa d'Égypte

Nuit de mi- Cha’ban

Question

Nous avons l'habitude depuis longtemps de célébrer la mi- Cha’ban.     

A cette occasion, tous les habitants du village se rassemblent dans la mosquée pour accomplir la prière d’al-Maghreb, réciter trois fois la sourate Yassine et enfin supplier Allah par des expressions coraniques tout en Lui demandant le pardon. Auparavant, on chantait solennellement les oraisons consacrées à la mi- Cha’ban ; mais actuellement on célèbre cette nuit par la récitation des extraits coraniques. Quel en est l'avis religieux ?      

En outre, nous célébrons les différentes occasions religieuses telles que la nuit de Destin, le Voyage Nocturne, la naissance du Prophète…etc. A de telles occasions, des prêcheurs et des savants tiennent des conférences religieuses au sein de la mosquée. On y organise également des concours accompagnés de chants religieux, en s’aidant des haut-parleurs plantés à l'intérieur et à l'extérieur de la mosquée toute décorée de lumière. Parfois, nous filmons en vidéo ces célébrations, préparons une table d’honneur pour les savants en face des fidèles et distribuons des boissons et de friandises. Vers la fin de la soirée, nous rendons honneur à ceux qui apprennent par cœur le Coran ainsi qu’à leurs maîtres sans oublier de récompenser les chargés du service à la mosquée.

Quel est l'avis religieux relatif à cette façon de célébrer ?

Réponse

La nuit de mi- Cha’ban est une nuit bénie. Ses vertus sont illustrées dans nombre de Hadiths qu’on qualifie de bons et forts. Quel que soit la qualité des Hadiths qui y sont relatifs, animer cette nuit bénie fait, sans doute, partie de la religion.     

Parmi les Hadiths évoquant les vertus de cette nuit, citons :     

Le Hadith rapporté par la mère des croyants Aicha :     

« Une nuit, je me suis réveillée pour découvrir que le Prophète ﷺ n’était pas à mes côtés. Partie, tout de suite, à sa recherche, je l’ai trouvé à al-Baqi'e la tête tendue vers le ciel. Conscient de ma présence, il m'a dit :    

« Crains-tu l’injustice de la part du Seigneur et de Son Prophète dans ta nuit ?! », « Non, cela ne m’est pas venu à l’esprit ; mais j’ai pensé que tu es allé jeter un coup d’œil sur l’une de tes autres femmes. », « La nuit de mi- Cha’ban _ reprit le Prophète _ Allah descend vers le premier ciel accordant le pardon à un nombre de personnes plus grand que le nombre de poils des ovins de la tribu de Banî Kalb1 . »     

Le Hadith rapporté par Mo'adh Ibn-Djabal selon lequel :     

« Pendant la nuit de mi-Cha'ban, Allah accorde son pardon à toutes ses créatures en les embrassant du regard, sauf aux polythéistes et à ceux qui cultivent la haine. 2 »     

Le Hadith rapporté par Ali Ibn Abi-Taleb selon lequel :    

« Si vous assistez à la nuit de mi-Cha’ban, passez la nuit en priant et la journée en jeûnant ; car au coucher du soleil de ce jour, Allah descend vers le ciel de ce bas-monde et dit : « Y a-t-il quelqu’un qui implore mon pardon pour que je le lui accorde ? Y a-t-il quelqu’un qui me demande de la richesse pour que je la lui donne ? Y a-t-il un malade qui m’invoque pour que je le guérisse ?... Et ainsi jusqu’à l’aurore3. »    

Il n'y a aucun inconvénient à ce qu’on récite solennellement et en groupe la sourate Yassine à la suite de la prière d’al- Maghreb, vu que cet acte est inclus dans l’ordre d’animer la nuit de mi-Cha’ban ; car cet ordre est de caractère général. Nul grief religieux à ce qu’on restreigne l’accomplissement des œuvres pieuses à certains lieux ou à certains temps avec assiduité sans pour autant les prendre pour des obligations. A ce propos, Abdoullah Ibn Omar dit :     

« Le Prophète avait l'habitude d'aller à la mosquée de Qouba tous les samedis, soit à pieds ou à monture4. »    

Dans Fat'h el Bari, al-Haféz Ibn Hajar dit :     

« Les différentes versions de ce Hadith, prouvent l'autorisation de consacrer assidûment certains temps à faire des actes pieux. »     

Dans Lataéf al-Ma'aref, al-Hafez Ibn Rajab dit :     

« Les Oulémas de la Grande Syrie divergent quant à la façon de célébrer cette nuit :    

1- Certains Ulémas ont indiqué qu’il est préférable de célébrer cette nuit en commun dans les mosquées. Khaled Ibn M'dane, Loqman Ibn A'mer et d'autres portaient pour cette occasion leurs meilleurs vêtements, se parfumaient et s’enduisent du Kohl pour animer cette nuit à la mosquée. Is'haq Ibn-Rahoya a approuvé cette façon de célébrer et dit à propos de la prière accomplie en commun durant cette nuit : « Il ne s'agit pas d'une innovation réprimandée. ». En effet, cet avis est rapporté par Harb al-Karmani dans son livre Massaïl.    

2- Certains autres ont estimé qu’il est détestable de se réunir aux mosquées pour animer cette nuit par la prière, les récits des pieux et l’invocation. Pourtant, il n'est pas désapprouvé que l'individu y accomplisse la prière à part. Telle est, en effet, l'opinion de l'imam et le grand jurisconsulte de la Grande Syrie, Cheikh al-Awza'y.     

Par conséquent, animer la nuit de mi-Cha’ban dans le cadre précité dans la question ne déroge pas à la Charia. On ne peut alors qualifier une telle célébration ni de détestable ni d’hérétique pourvu que cette célébration n’ait pas un caractère obligatoire. Si l'on oblige l'autrui à suivre cette tradition ou lui en reproche l’abandon, on risque alors de commettre une innovation réprimandée en rendant obligatoire un acte qui ne l’est pas en fait. Raison pour laquelle, certains vertueux prédécesseurs détestaient d’animer en commun cette nuit. Tant que l’acte n’est pas obligatoire, y déroger donc n’est pas blâmable.      

Célébrer les différentes occasions religieuses est un acte préférable tant que cette célébration n’est pas entachée d’interdits. La preuve en est que la Charia recommande de rappeler aux gens les jours bénis d'Allah :     

« Rappelle-leur les jours bénis du Seigneur5. »     

La Sunna a souligné cette signification :    

Dans Sahih Mouslim, il est cité que le Prophète ﷺ jeûnait tous les lundis, en disant :    

« C'est un jour où je suis né. »     

Dans les deux Sahih, Ibn-Abbas dit :     

« A l'arrivé du Prophète à Médine, il a vu les Juifs jeûner le jour d’Achoura. Le Prophète ﷺ leur a demandé : « Pour quelle raison observez-vous le jeûne ?»    

- C'est un jour important où Allah a sauvé Moïse et son peuple et noyé Pharaon et les siens. Moïse le jeûnait en guise de reconnaissance, c'est pourquoi nous le jeûnons.    

- Je suis plus en droit que vous de jeûner ce jour-là en souvenir de Moïse. À partir de ce moment-là, le Messager d'Allah ﷺ a commencé à jeûner et a ordonné aux Musulmans de faire de même. »      

Bref, les moyens de commémoration précités sont autorisés et ne sont ni détestables, ni hérétiques. Il s’agit plutôt d’une glorification des injonctions d'Allah :     

« Et quiconque exalte les injonctions sacrées d'Allah, s'inspire en effet de la piété des cœurs6. »    

- 1- Cité par at-Tirmidhy, Ibn Maja et Ahmad. 2- Cité par at-Tabarani et qualifié authentique par Ibn Hibban.  3- Cité par Ibn Maja. 4- Hadith rapporté par al-Boukhari et Musli.  5- Coran, Ibrahim. V.5.  6- Coran, al-Hajj.32.

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