Qui est le Mufti ?

Dar al-Iftaa d'Égypte

Qui est le Mufti ?

Question

Qui est le mufti ? Quel est son rôle ? Et quelles sont les conditions requises pour devenir mufti ?

Réponse

 

Afin de bien connaître qui est le mufti, il est indispensable de connaître le sens linguistique et terminologique du mot « mufti », ses conditions d'aptitude et ses qualités personnelles.

 

Au sens linguistique, le mot mufti est le participe actif du verbe arabe afta (أفتى). Quiconque délivre une fatwa, même pour une seule fois, est appelé mufti.

 

Au sens terminologique, le mot fatwa (فتوى) signifie l'indication de l'avis religieux, étayé de preuves dans les différentes circonstances, à celui qui le demande.

 

Au sens religieux, le mufti est celui qui s'engage de faire comprendre aux gens les questions de leur religion. Il est également celui qui connaît les prescriptions coraniques à caractère général ou spécifique, l'abrogeant an-nasikh et l'abrogé al-mansoukh, les institutions prophétiques et les méthodes de la déduction. Quiconque atteint dûment ce rang, méritera d'être qualifié de mufti et pourra indiquer l'avis religieux concernant les questions posées. Par contre, ne mérite pas ce rang quiconque connaît parfaitement les détails d'une question tout en possédant la capacité potentielle de saisir le sens de toutes les prescriptions religieuses. Donc, il est permis à une personne de délivrer une fatwa à propos d'une question dont elle est au courant de tous ses détails, de tous les arguments et de la méthodologie à s'en servir pour déduire les prescriptions religieuses.

 

Conditions d'aptitude de l'institution du mufti

 
1- Conditions non exigées :
 

Il y a beaucoup de conditions non exigées. On sait qu'il n'est pas logique de qualifier de condition les dispositions non exigées, car, normalement, les conditions non exigées ne méritent pas d'être stipulées. Pourtant, nous tenons à les citer puisque nous vivons dans une époque où tout s’est mêlé. C'est pourquoi, nous nous trouvons dans l'obligation de les citer :

1-         Il n'est pas unanimement exigé comme condition que le mufti soit de sexe masculin puisque la fatwa donnée par une femme est valable.

2-         La liberté n'est pas une condition exigée puisque l'esclave peut exercer la fonction du mufti.

3-          Il est unanimement établi que l'usage de la langue n'est pas exigé puisque le muet peut exercer la fonction du mufti en délivrant des fatwas par écrit ou par des gestes bien compréhensibles.

4-         Il est unanimement établi que la vue n'est pas posée comme condition puisque, selon l'avis des malékites, l'aveugle peut délivrer la fatwa.

5-         Pour l'ouïe, certains jurisconsultes hanéfites l'exigent comme condition et par conséquent la fatwa délivrée par un sourd de naissance n'est pas valable. Cependant, Ibn 'Abdine dit :

« Si l'on lui pose une question par écrit et il y répond, cette réponse sera évidemment applicable. Cependant, il ne doit pas être nommé au poste de mufti étant donné que savoir écrire et lire n'est pas à la portée de tous.  Il est à noter que cette condition est uniquement posée par certains hanéfites. » 

 
Conditions contraignantes :
 

1-         L'Islam : les fatwas des non musulmans ne sont pas acceptables.

2-         La raison : la fatwa délivrée par un fou est invalide.

3-         La maturité : le mufti doit atteindre l'âge de puberté ou l'âge de 15 ans ; car la fatwa délivrée par un mineur est invalide.

4-         Le savoir : l'émission d'une fatwa sans connaissance de l'avis religieux est interdite ; car elle implique le mensonge contre Allah et son Messager. Elle implique également le fait d'induire les gens en erreur, ce qui représente un péché majeur. A ce propos, Allah dit:

 

 « Dis encore : «Mon Seigneur a interdit seulement les turpitudes apparentes ou occultes, le mal et toute violence injustifiée ; de même qu’Il a interdit de Lui prêter des associés qu’Il n’a jamais accrédités et de dire de Lui des choses dont vous n’avez aucune connaissance.[1] »

 

Dans ce verset, Allah a joint ce péché aux turpitudes, à la violence injustifiée et au Polythéisme.

 
 De même, le Prophète dit :

« Certes, Allah ne fait pas traire la science en l’enlevant des poitrines des hommes, mais plutôt par la mort excessive des savants. Lorsque la terre sera dépourvue des savants, des faux savants viendront à la tête des gens et les égareront en donnant des réponses erronées à leurs questions. [2] »

 
 Il dit également :

« Quiconque délivre une fatwa sans connaissance, retombera sur lui le péché de celui qui la met en pratique.[3] »

5-         La spécialité: par cette condition, nous entendons que celui qui cherche à devenir mufti doit étudier profondément le fiqh, ses fondements et ses principes. Il doit également avoir une bonne expérience en matière de questions religieuses et de réel vécu. Actuellement, il vaut mieux qu'il prépare des études supérieures dans une université accréditée dans cette spécialité. Si cette condition est exigée pour l'acquisition de la science et la faculté de l'Ijtihad, il en va de même pour la maîtrise de fiqh et la capacité d'y former des opinions personnelles.

 

 Nous avons mentionnée la condition de spécialité à part, bien qu’elle incluse dans celle du savoir et de l’ijtihad,  pour mettre le point sur l'anarchie des fatwas venant de toute part et émises par les non spécialistes en la matière. Ces faux savants ne cessent cependant, de controverser et de s'opposer à des fatwas dont les fondements de bases leur échappent. Les savants prédécesseurs ont évoqué l'importance de la spécialité. A notre époque, nous nous trouvons devant des incompétents non spécialistes qui, par désir de célébrité ou de fortune, émettent des fatwas sans pour autant remplir les conditions requises en la matière ; ce qui est si grave. Comme le dit le proverbe, « Parler de ce qu'on ne connaît pas, c'est vouloir jouer aux échecs sans échiquier. »

6-          L'équité : la personne équitable est celle dont la moralité n'est pas douteuse et le comportement ne trahit pas un mépris pour les règles de conduite admises et pratiquées dans une société telles que le fait de marcher les pieds nus dans la rue ou les autres actes désapprouvées par la société. C'est ainsi que la fatwa émise par un dépravé n'est pas valable, d'après la majorité des savants. Quant aux innovateurs en matière de religion, leurs fatwas ne seront valables si leur innovation est de nature à détourner de la religion ou à inviter à la perversité, sinon, leur fatwa relative aux sujets exempts de toute innovation serait acceptable. A ce propos, al-Khatyb al-Baghdadi dit :

 « Les fatwas émises par les personnes capricieuses et ceux dont l'innovation ne rend pas son auteur mécréant ou pervers sont recevables. Quant aux Chorats[4] et des Râfidites[5] qui insultent les Compagnons et les Prédécesseurs, leurs fatwas ainsi que leurs propos sont irrecevables. »

7-         L'Ijtihad[6] : c'est l'effort déployé pour déduire les règles de la Chari'a à partir des sources considérables. On n'entend pas par là le fait de déployer un remarquable effort au sujet de chaque fatwa, mais plutôt l'accession du savant au rang de Mujtahid.

 

D'après al-Khattab, ach-Café'i dit :

« L'émission de la fatwa n'est permise qu'à un savant versé dans les sciences du Coran, à savoir dans l'abrogeant et l'abrogé, les textes précis et les textes claires et ceux équivoques, les contextes et l'interprétation, les versets mecquois et ceux médinois, le sens visé, etc. Il doit également être autant versé dans les sciences de Hadith que dans celle du Coran. De même, il doit avoir une bonne connaissance en matière de langue et de poésie arabes et de tout ce dont on a besoin pour comprendre le Coran et la Sunna et pour s'en servir sans outrance. Enfin, il doit être au courant des spécificités de différentes contrées tout en jouissant d'une disposition naturelle. Un tel savant a le droit d'émettre la fatwa pour indiquer ce qui est licite et ce qui ne l’est pas, sinon, il ne peut pas indiquer l'avis religieux. »

8-          Le génie avisé : ceci veut dire que le moujahid est rarement sujet à l'erreur qu’il réalise toujours une déduction valide. Pour arriver à ce stade, il doit se faire une idée juste de la question posée. Plus l'idée conçue du sujet est juste, plus le mujtahid gagne en estime. Cette qualité ressemble à ce qu'on appelle dans la psychologie la conception créatrice. Il s'agit d'une discipline dont l'étude profite à celle des fondements de fiqh et qui, à notre époque surtout, fait partie des moyens de l'Ijtihad. C'est pour toutes ces raisons que la fatwa émise par un idiot ou une personne sujette de manière remarquable à l'erreur est irrecevable. Le mujtahid doit, au contraire, pénétrer, grâce à ce don inné, l'objectif visé et les preuves des contextes pour donner des jugements bien fondés. An-Nawawi dit :

« Pour être mufti, il est exigé qu'on soit d'une âme intelligente, d'un esprit sain, d'une pensée solide et d'une déduction exacte. »

9-         Perspicacité et prévoyance : le mufti doit être perspicace, vigilant et conscient de la duperie et de l'artifice des gens contre lesquelles il doit prendre ses précautions. Combien de questions dont la façade est de marbre et l'intérieur est de suie.

 

Bref, ce sont les conditionsque le mufti doit remplir. Il y a d'autres qualités dont le mufti doit se parer. En voici les détails :      

 
Qualités personnelles du mufti
 

Le mufti doit se parer de beaucoup de qualités dont nous allons citer quelques-unes soulignées déjà par les Oulémas :

1.         D'après l'imam Ahmad :

« L'homme ne doit se présenter au poste d'al- Iftaa, qu'après avoir ces cinq qualités : la première : être sincère, sinon, il se priverait alors de l'éclat de l'être et de la force du verbe. La deuxième : être paré du savoir, de la sobriété, de la magnanimité et de la quiétude. La troisième : avoir un pied ferme en matière de savoir. La quatrième : avoir le suffisant pour vivre, sinon les langues acérées ne le laisseraient en paix. La cinquième : avoir une bonne connaissance des caractères humains. »

2.         La transmission et l'indication de l'avis religieux ne peuvent être assurées que par un savant sincère de bonne réputation et équitable en acte et en parole.  

3.         Le mufti doit prendre soin de ses habits tout en respectant les règles de la Chari'a relatives à la pureté et à la propreté. Il doit également éviter de porter les habits en soie, l'or et les vêtements ostentatoires des incrédules. Par contre, porter des vêtements élégants et convenables a un effet bénéfique sur ses auditeurs car, tout comme le juge, l'effet de l'apparence du mufti est indéniable chez les gens.

4.         Le mufti doit avoir une bonne réputation en se conformant, par parole et par acte, aux principes de la Chari'a puisque les gens le prennent pour exemple à suivre et tous les regards tournent vers lui.

5.         Le mufti doit veiller à ce que son fort intérieur soit toujours bon tout en ayant présent à l'esprit la gravité de sa mission de succéder au Prophète dans la transmission et l'exécution des ordres contenus dans le Coran et la Sunna pour guider les gens au chemin droit. Pour arriver à ce stade, il doit demander à Allah de l'aide et Lui solliciter la réussite. Il doit également se montrer au-dessus des mauvaises intentions telles que le fait de tirer orgueil et fierté de la véracité de sa réponse par rapport à la faillibilité de  son adversaire. D'après Sahnoun :

« La vanité tirée de la réponse juste est plus grave que celle tirée de la possession d'une fortune énorme. »

6.         Le comportement du mufti doit être en conformité avec les injonctions qu'il donne, sinon, son acte contredira sa parole et aura un impacte négatif sur le demandeur. Pourtant, le manque occasionnel de cette conformité n'empêche pas le mufti d'émettre la fatwa, étant donné que personne n'est exempt du péché. En effet, il est établi par les Oulémas que le fait d'ordonner le convenable et d'interdire le blâmable, ne requiert pas la conformité avec l'ordre d'obligation ou d'interdiction, à moins que la dérogation ne porte atteinte à son équité, sinon sa fatwa sera rejetée.

7.         En délivrant sa fatwa, le mufti doit éviter de tomber sous l'effet de la colère, de la joie, de la faim, de la soif, de la fatigue, du changement d'humour, du sommeil, de la maladie, de la chaleur aride, du froid vif, de la pression des besoins naturels ou de tout acte de nature à déconcentrer sa réflexion sur le problème posé et la déduction d'un jugement tout comme le juge, le mufti doit, en émettant une fatwa obéir au conseil du Prophète :

 « Le juge, en état de colère, ne doit pas trancher un conflit entre deux parties antagonistes. [7] »

Si le mufti se sent perturbé par l'une des causes précitées, il devra s'abstenir de délivrer des fatwas jusqu'à ce qu'il retrouve sa stabilité.

8.         Si le mufti délivre une fatwa tout en ayant le cœur distrait, sa fatwa, en dépit du risque couru, sera recevable à condition qu'il ne se détourne pas de l'avis juste. Toutefois, les Malékites posent comme condition que la distraction ne doive produire un effet négatif sur sa réflexion, sinon, sa fatwa sera rejetée même si elle est juste.

9.          Si le mufti a confiance en un savant, il doit le consulter pour éviter toute forme de vanité en s'élevant au-dessus de tout conseil emparant seul de la réponse. C'était le cas des grands Califes, particulièrement ‘Omar dont les consultations avec les Compagnons du Prophète étaient innombrables. Par la consultation, le mufti peut découvrir ce qui lui est implicite, à condition que la consultation ne se transforme pas en divulgation d'un secret. La fonction du mufti, comme celle du médecin, exige la discrétion, car les gens lui dévoilent leurs secrets dont la trahison pourrait leur causer des préjudices. C'est pourquoi, le mufti doit garder les secrets des demandeurs de la fatwa car l'indiscrétion pourrait emmener le demandeur à cacher la vérité.

10.     Le mufti doit rendre compte de la condition du demandeur de sorte que :

a-         Si le demandeur est lent d'esprit, le mufti doit avoir une grande patience pour comprendre sa question et pour lui faire comprendre la réponse.

b-         S'il s'avère que le demandeur a besoin de comprendre des détails religieux qui ne sont pas évoqués dans sa question, il sera du devoir du mufti de les lui expliquer à titre de conseil et d'orientation. Les oulémas ont déduit cette règle de ce Hadith:

Interrogé par les Compagnons sur la validité de l'ablution avec de l'eau de la mer, le Prophète répondit : "L'eau de la mer est pure et ses poissons même morts sont licites. [8]"

 

D'ailleurs, il est permis au mufti de répondre à la question du demandeur par une autre réponse inattendue pour indiquer ce qui est plus utile au demandeur. Allah dit :

« Ils t'interrogent : "Qu'est-ce qu'on doit dépenser? " Dis "Ce que vous dépensez de bien devrait être pour les père et mère, les proches, les orphelins, les pauvres et les voyageurs indigents. Et tout ce que vous faites de bien, vraiment Allah le sait. [9]»

 

Dans ce contexte, les gens ont interrogé le Prophète sur l'objet à dépenser. Pourtant, le Prophète leur a indiqué les destinations des objets dépensés, eu égard à leur importance. 

c-         Si le demandeur pose une question relative à un besoin déterminé et trouve que la réponse du mufti lui interdit ce besoin, il sera du devoir du mufti, dans ce cas, de lui proposer une alternative; tout comme le docteur qui interdit certains aliments à son malade et lui propose d'autres.

d-        Si le demandeur pose une question basée sur des éventualités qui nécessitent un effort de raisonnement individuel, le mufti pourra alors orienter la réponse vers ce qui profite au demandeur. Ibn 'Abbas dit des Compagnons:

« Ils n'interrogeaient le Prophète que sur ce qui pourrait leur être utile. »

 Il dit également à 'Ikrema :

 « O 'Ikrema, va répondre aux questions religieuses utiles aux gens et ne prête pas attention à ceux qui interrogent sur ce qui ne les regarde pas. Ainsi la tâche te sera facile. »

11.     Si la réponse échappe à la compréhension du demandeur, le mufti doit y renoncer en application du dire du Prophète :

 « Ne parlez aux gens qu'avec ce qu'ils puissent comprendre. Voulez-vous qu'on traite de mensonge la parole d'Allah et de Son Messager ? [10] »

 

Ibn Mass'oud dit:

« Parler aux gens des choses qui dépassent leur compréhension risque de jeter le trouble dans l'esprit de certains parmi eux. [11] »

 

Parmi les règles de bienséance que le mufti doit observer et qui pourraient à nos jours atteindre le statut contraignant des conditions, figure le fait de rendre facile la vie des gens, de les attirer à la religion d'Allah, d'être discrète à leur défauts, de les faire suivre une opinion basée sur un principe religieux… Ceci vaut mieux que l'intransigeance qui les répugnera carrément de la religion, ou les jettera dans la perversion en les détournant inconsciemment de la voie de leur Seigneur.

 

12.     Le mufti doit veiller à suivre la doctrine des quatre Imams. Il ne doit les contrarier que dans les limites les plus restreintes tels que les exigences de notre temps ou le besoin des gens à d'autre opinion pour réaliser un intérêt public. Dans un cas pareil, le mufti est censé de puiser son opinion dans la source originale de la Chari'a ou dans le domaine de la Jurisprudence islamique qui regroupe plus de quatre-vingt Mujtahids, ou encore dans la jurisprudence des Compagnons que renferment les grands livres de fiqh tels que Mussannaf d'Ibn Abi Chaybah, celui de 'Abdel-Razak, al-Moghni d'Ibn Qudama et al-Magmou' d'Al-Nawawi. En outre, il faut se référer aux conseils Juridiques tels que l'Académie des Recherches Islamiques, l'Académie de la Jurisprudence Islamiques annexée de l'Organisation de la Conférence Islamique à Djedda. Il en va de même pour le corps enseignant dans les universités religieuses. Le choix effectué de l'opinion doit être basé sur une preuve reconnue, réalisant ainsi l'intérêt public, écartant tout embarras religieux, permettant de propager l'Islam équitable, attirant les créatures vers la voie de leur Créateur et non pas le contraire.

 
Troisièmement: Essence de la fonction du Mufti :

L'émission d'une fatwa, étant le fait de transmettre l'avis religieux à l'appui d'une preuve, requiert certaines conditions:

1-         Saisir par l'esprit la qualification religieuse de la question juridique. Si cette opération est facile à réaliser, il n'y aura lieu à l’Ijtihad comme, par exemple, l'interrogation portant sur les piliers de l'Islam ou le jugement relatif au fait de croire au Coran. Par contre, si la preuve sur laquelle s'appuie la fatwa échappe à l'entendement comme par exemple le verset coranique dont le sens est équivoque ou le Hadith qui n'atteint pas le niveau de la notoriété ou dont le sens est aussi équivoque; ou bien si l'avis juridique est appuyée sur des preuves contradictoires; ou bien si la question n'est pas couverte par un texte, dans ce cas, la prise de la décision juridique nécessite de déployer un effort pour prouver l'authenticité et l'établissement de la preuve afin d'en déduire la qualification religieuse ou y appliquer le raisonnement analogique. 

2-         Le mufti doit connaitre parfaitement l'objet de la question en se renseignant auprès du demandeur. Il peut également demander information à un autre en cas de nécessité et méditer sur les contextes.

3-         Le mufti doit assurer la conformité de la qualification religieuse à l'objet de la question en vérifiant la raison d'être de cette qualification saisie par l'esprit; car la Chari'a n'a pas donné de qualifications propres à chaque détails. En effet, elle a établi des règles générales et indéterminées concernant des cas innombrables. Chaque cas a son propre caractère. Ces caractères ne sont pas tous pris en considération. Il y en a ce qui est pris en compte et les laissés pour compte. Il y a également des caractères qui oscillent entre les deux. Donc, le mufti doit examiner chaque cas à part, que cet examen soit facile ou difficile afin qu'il puisse établir son argumentation et savoir sous quelle preuve le cas pourrait être inclus. Si le mufti y arrive, il applique le jugement au cas. Cet effort déployé est indispensable pour le juge et le mufti. A supposer que l'Ijtihad n'existe plus, le jugement des actes des hommes remplissant les conditions nécessaire pour être chargé d'accomplir une obligation religieuse ne pourrait avoir lieu que dans l'esprit; car les actes ainsi que leurs qualifications ont un caractère général et absolu. Or, les actes des humains ne sont pas absolus, mais ils sont spécifiques et propres à des personnes déterminées. La qualification religieuse de ces actes ne peut être formulée qu'après avoir su que cet acte déterminé est inclus dans ce qui est absolu ou généal. Ceci peut être aussi bien facile que difficile et fait partie de l'Ijtihad.

En voici un exemple : l'homme doit-il subvenir aux besoins de son père ?

Le mufti doit d'abord étudier les preuves fournies dans ce genre du cas. Il s'avère que la qualification religieuse de cette question consiste à dire que le fils riche doit subvenir aux besoins de son père pauvre. Ensuite, il doit se rendre compte du statut financier du père et de son fils, à savoir des biens qu'ils possèdent et des dettes qu'ils doivent, chacun à sa part. Il doit également tenir compte des charges que doit assumer chacun et de tout ce qui pourrait effectuer son jugement. Enfin, il doit définir le critère de l'institution du jugement qui est ici la richesse et la pauvreté car le riche et le pauvre à qui se rattache le jugement ont deux points extrêmes et un autre de séparation. La richesse par exemple a deux limites maximale et minimale permettant l'inclure et l'exclure du cadre de la richesse, mais elle oscille autour le point de séparation. Il en va de même pour la pauvreté. C'est pourquoi, le mujtahid doit déployer ses efforts pour formuler la qualification religieuse adéquate à la question.

 

Cette forme d'Ijtihad est indispensable pour chaque cas – c'est ce qu'on appelle l'existence du critère ou la pierre de touche du jugement –. En effet, chaque cas a son propre caractère qui n'avait pas de semblable. A supposer qu'il y en ait, il serait indispensable de vérifier la similarité; ce qui constitue également une forme d'Ijtihad.      



[1]Coran, al-A'raf, v. 33.  

[2]Hadith rapporté par al-Boukhari.

[3]Hadith cité par ad-Daremey et al-Bayhaqey et jugé authentique par al-Hakim.

 

[4] Des Kharijites dénommés Chorats, pluriel de Char (شار), dérivé du verbe Chara (vendre); en référence à ceux qui ont payé de leur vie l'agrément d'Allah. 

[5]  Râfidites en arabe : rāfid (رافض). Le pluriel est rawāfidروافض c'est-à-dire hérétique. Il s'agit d'une secte chiite.

[6]L’effort effectué par un juriste afin de déduire, avec un degré de probabilité, les règles de la Chari‘a à partir des indications détaillées dans les sources, telles que les questions concernant l'indication des fondements de l'Islam.

 [7]Cité par al-Boukhari

[8]cité par Abou Daoud et at-Termidhi; et jugé authentique par al-Hakem.

[9]al-Baqarah, 215.

                [10]Cité par al-Boukhari.

[11]cité par Muslim.

 

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